Je dors dans cette boue et suis en première ligne,

Sachant rester debout, tentant de rester digne.

Mes seuls paysages sont de frêles barbelés,

Dessinant le carnage de mes jeunes années.

 

J’ai pour unique sursis de vulgaires crapouillots,

Qui doivent enlever des vies pour défendre un drapeau.

Et puis je ne suis pas seul, les rats tiennent compagnie,

Les poux fleurissent ma gueule de poilu amaigri.

 

 Je dors dans cette boue avec pour horizon,

Les obus et leurs trous près du fort Douaumont.

Je pense encore à toi, à tes yeux embués,

Lorsqu’un train mit ma voie vers les célèbres tranchées.

 

J’ai pour unique sursis d’avoir la foi en l’homme,

Français, Allemands, meurtris, se posant un Warum.

On rêve d’une vie civile, espère les dames blanches,

Redoute qu’on nous mutile pour une quelconque revanche.

 

Je dors dans cette boue avec pour seul avenir,

De courir comme un fou au milieu de ces tirs.

Pour grignoter un mètre sur une terre infertile,

Ayant pour seul maître le souvenir d’une pupille.

 

J’ai pour unique sursis, pour ces quelques secondes,

D’avoir donné la vie à ces têtes brunes ou blondes.

Alors portez cette paix au nom des disparus,

En esquissant les traits d’un soldat inconnu.


 

  • Type de Création Commémoration
  • Auteur Jocelyn Paré
  • Date de création 11 novembre 2013

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